Vendredi 1er novembre 2024

Le mot du mois qui vient sera "psoas". C'est ça qu'on va cibler. Isaline a besoin de stabilité pelvienne, ce qui se s'identifie de façon logique par le fait qu'elle est incapable figer une pause et qu'il lui faut des cale-troncs sur toutes ses chaises. À quatre pattes elle va affaler ses fesses sur ses talons, ou se dandiner pour tester la résistance du squelette et chercher un appui interne entre les côtes et les hanches, mais ça se dérobera. Elle ne va pas gainer pour bloquer, forcer sur les bras, ou savamment doser des réflexes intérieurs pour maintenir.

Pour ça, la nouvelle directive est de la suivre quand elle marche sur les genoux et les mains, avec nos propres mains juste au dessus de ses talons, et de lui opposer une résistance en retenant la jambe qui voudrait partir vers l'avant. Ça lui complique un peu les choses, mais c'est ce qu'on peut faire de mieux pour muscler la prochaine étape, qui est de lever suffisamment le genou pour poser le pied devant soi avec encore les mains par terre, et de forcer sur la jambe pour propulser l'autre, et, avec encore les mains par terre, les deux pieds posés et les fesses très en l'air, se relever tout en sollicitant les fessiers et les dorsaux. Le salon prend un peu des allures de théâtre de troisièmes mi-temps avec Isaline en tête de cortège. Ça nous garde jeunes. On attend la stuhl-parade.

Il a fait beau ces derniers temps, et pas trop froid alors on a ressorti le vélo. Il est pas génial avec son guidon rectangulaire et son frein à pédale. mais il est stable et ça pulse. Isaline a compris le coup du pédaler en arrière pour perdre de la vitesse. En revanche avec ses mains elle n'a aucune notion de la direction et c'est plus le terrain avec ses déclivités ou ses irrégularités qui choisit la direction de sa bicyclette que ses mouvements de bras. J'étais bien content qu'elle fasse pas un strike dans les jeunes basketteurs. Mais en tous cas elle pédale bien, et la tête haute ! Voyez plutôt !

Si elle a un port un peu plus altier, c'est parce qu'on travaille aussi des exercices aux noms d'animaux. Pour la tortue, elle se met en oeuf avec face contre terre et les coudes sous le ventre et les mains à plat de chaque côté du menton. À "trois" elle doit lever la tête sans lever les épaules. Pour l'instant ça ne marche que si quelqu'un est en face d'elle pour faire miroir, mais c'est facile. Ça cible uniquement la nuque et c'est un "oui" qui part de plus bas. Il parait que c'est la base absolue. Elle était incapable de le faire, elle passait par le côté, comme "peut-être" pour ensuite relever la tête, et c'est devenu mieux. On travaille aussi "en bateau ma mie ma mie" qui permet, assis au sol, d'aller en avant et en arrière en se tenant les mains et en insistant pour qu'elle garde ses yeux dans les nôtres, malgré le balancier. Là aussi il y a du dosage dans le mouvement du "oui" qui s'installe. La grenouille, la toupie, l'escargot, le crocodile, le train... On se marre... On la manipule, et elle fait du mieux qu'elle peut.

Sinon elle a des nouveaux codes couleur pour ses pictogrammes et elle enchaîne les phrases à trois éléments. Ce soir à dîner elle n'en voulait plus et elle a dit "moi isaline" en se tapant le ventre avec sa main recroquevillée et ses doigts sur son ventre, ensuite elle a pointé le picto "fini" avec les deux mains qui partent du centre et qui partent chacune d'un côté, et ensuite elle a mis ses doigts dans la bouche en faisant "aaaa" pour dire "manger". Elle est multi-modale. C'est fort ! Et surtout 3 éléments dans la phrase, c'était un objectif, et on se réjouit d'en rajouter.

J'ai lu des réflexions qui distinguent l'activité cérébrale de l'activité mentale. La faculté de contrôler son corps depuis le cerveau est totalement séparée de l'état d'esprit, de la mémoire, du rêve ou de l'humeur. La fonctionnalité d'Isaline est très abimée. Mais ! Elle sourit tout le temps, parce qu'on lui sourit tout le temps, et grâce à tout plein d'astuces pratiques, comme ce vélo, elle peut quand même ressentir plein de petits trucs qui la ravissent. Là par exemple elle a le vent dans les cheveux et elle va toute seule hyper vite... Ça parait rien, mais c'est inouï !

Renforce-toi, Isaline chérie.